Archives expositions personnelles France

Archives expositions personnelles (U-V-W-X-Y-Z)

Textes de Beatrix von Conta


"Le paysage commence sous mes pieds. Invisible. Minuscules surfaces dont la ferme résistance assure et consolide l’appui du regard, favorise son envolée légère. Photographier le paysage est une affaire vertigineuse qui saisit le corps entier, aiguise les sens, remplit à la fois de bonheur et d’effroi."

"L’expérience du paysage, vécue souvent comme un loisir sans conséquences, glisse vers une aventure inattendue dès que l’on accepte que derrière les apparences du visible se tapissent les ombres de la civilisation et les peurs enfouies de l’enfance. Le paysage pousse sur le terreau fertile de notre imaginaire. D’une épaisseur insoupçonnée, il ne se résume point à la somme de ses ingrédients descriptibles et quantifiables. Il résiste aux définitions habiles qui séparent le paysage urbain du paysage tout court. Il nous échappe et nous renvoie à notre perception imparfaite, sélective, fugitive. Tout paysage est extrêmement vivant, mais nous ignorons son langage. Face à cette belle inconnue, l’attention se révèle impérative, rien ne sera qualifié d’anodin, chaque détail aura son importance et sa raison d’être. Le loup risque de revêtir la douceur de l’agneau. L’apparence des choses n’est jamais que la face visible de l’iceberg et toute navigation dans ce paysage mouvant à facettes multiples se fera forcément à vue, à la lumière de l’impromptu. Le sujet, finalement, importe peu. Entre le flanc escarpé d’une montagne, la frontalité d’un mur en béton, la vibration d’un champ d’oliviers, aucune hiérarchie ne s’impose. Je regarde, j’attends, et selon une alchimie étrange s’établissent les points de vue, s’organisent les éléments, s’affinent les concepts. Souvent au radar, jamais au hasard. Dans chaque ensemble d’images, j’explore ainsi au plus près et aussi loin que je peux la matière d’une réalité infinie. Séries closes, avec un début et une fin, un titre, une date. Autant de tentatives vaines, mais toujours recommencées, de cerner les paysages sous la surface, à l’aplomb de mon embarcation photographique."

Beatrix von Conta


Glissement de terrain


Tout paysage est double: point de vue concret face à un fragment du réel, et miroir de l'âme. Il peut s'inscrire dans un territoire défini sur le plan géographique, politique, économique. Dans Glissement de terrain émerge la superposition inattendue de plusieurs territoires: politique, urbanistique et affectif, conjonction liée à ma rencontre avec la ville de Toulon.


La question du territoire dans ce travail s'est posée, imposée devrais-je dire, depuis mon installation à Toulon en 2004. Y habiter n'était pas un choix ou un désir, mais le résultat d'un concours de circonstances. Ville composite, hétérogène, mêlant tous les styles architecturaux, ayant souffert pendant longtemps de l'absence d'une vraie politique urbanistique. Toulon, coincée entre la montagne du Faron et la Méditerrannée, n'affiche d'autres images fédératrices que son port militaire et la fameuse rade avec ses bâtiments de guerre.


Mon approche du paysage toulonnais s'est faite à contrecoeur, à reculons, par le biais d'une pratique quotidienne, obligatoire. Curieusement, et malgré moi, c'est ce tissage urbain incohérent et anarchique, son côté "mégalomane" en dépit d'une pauvreté apparente, qui s'est révélé un matériau photographique riche et inattendu. Glissement de terrain est devenu ainsi l'histoire d'un attachement.


Sans l'intention de constituer un inventaire exhaustif de la ville ou d'en faire un portrait ressemblant, je tente d'établir une trame d'images sensible et souple, un chassé-croisé de fils et de couleurs. Nulle démarche dénonciatrice fustigeant le laid pour mettre en relief le beau, nul désir d'unifier dans un mur d'images ce qui se révèle à la fois singulier et répétitif, mais une attention constante à la complexité d'une ville en pleine mutation. Face à la fragmentation et son corollaire: l'enchevêtrement de formes, lignes et écritures, les prises de vue avec cadrages basés sur une frontalité favorisent le découpage de "tableaux paysagers" dans lesquels la notion de verticalité se traduit fréquemment par l'omniprésence de poteaux, supports signalétiques, réverbères, mâts en tous genres. Petits glissements de terrain, comme si les mâts des voiliers du port de plaisance avaient trouvé ancrage sur la terre ferme. Dans ces photographies se profile la lente élaboration d'une ville imaginaire, sur fond d'une toile urbaine bien réelle, à compléter par le regard de l'autre, à investir par une lecture différente.





 


© Beatrix von Conta, série Glissement de terrain. Courtesy galerie Le Réverbère, Lyon © Beatrix von Conta, série Glissement de terrain. Courtesy galerie Le Réverbère, Lyon

© Beatrix von Conta, série Glissement de terrain. Courtesy galerie Le Réverbère, Lyon

Miroirs aux alouettes, 2004-2005

Dans cette série de 17 photographies couleur argentiques, se "joue" le détournement de la notion du cliché et de la carte postale par le biais d’un dispositif de petits miroirs qui évoque – et provoque – la fragmentation du paysage et de sa réalité visible en de multiples "trompe-l’oeil". Une pure fiction de vraies images interrogeant la fonction et la perception convenue de ce qui incarne d’une façon réductrice et stéréotypée l’image d’une région : la Provence.


Aix-en-Provence, Place d'Albertas © Beatrix von Conta



Aix-en-Provence, Place d'Albertas © Beatrix von Conta

Images de Vanoise - Paysages à l’heure du jour, 2006 - 2008


Photographies couleur prises au cours de 2 ans de traversées du plus ancien parc national de France, elles relèvent les signes infimes ou marquants de sa mutation et de sa fragilité évidente. Elles questionnent avec une distance critique ces espaces d’une extraordinaire variété paysagère. Réalisées dans le cadre de l’Observatoire photographique des paysages de Vanoise, mis en place par le Parc National de la Vanoise afin de témoigner de l’évolution des paysages contemporains, ces images font partie d’un fonds de séries photographiques qui seront réactualisées, périodiquement, selon des intervalles pouvant aller de la saison au siècle, à partir du même point de vue.


 Beatrix Von Conta
 Galerie Le Belvédère, Lyon  
 30.04-26.07 & 03-13.09.2008

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Beatrix Von Conta, Galerie Le Belvédère, Lyon

Exposition du 30 avril au 26 juillet et du 3 au 13 septembre 2008. Galerie Le Réverbère, 38 rue Burdeau - 69001 Lyon. Tél.: +33 (0)4 72 00 06 72. Ouverture du mercredi au samedi de 14h à 19h et sur rendez-vous. Entrée libre.


De gauche à droite : Coupures-reprises, 2007 © Beatrix von Conta

 et Miroir - plage de l'Almanarre, Hyères © Beatrix von Conta


De gauche à droite, Val d'Isère, 2006 et Tigne © Beatrix von Conta


Coupures/reprises, 2007

Travail sur le thème de la "frontière", réalisé dans le cadre d’une résidence à l’occasion de la quatrième édition des Photaumnales de Beauvais, la création de Coupures/reprises est constituée d’une accumulation de fragments qui crée une vision stratifiée de l’espace urbain et questionne le territoire géographique, mais aussi ses limites imaginaires, celles projetées par la photographe sur les espaces, ainsi que les frontières invisibles et métaphoriques que révèle la photographie. Coupures/reprises est paru aux éditions Créaphis avec un texte de Jean-Pierre Nouhaud.